Opus n° 10 : Lumières sur… les percussions

La famille des percussions est vaste et disparate, elle regroupe tous les instruments dont le son résulte d’une frappe ou d’une friction sur un matériau qui en détermine la sonorité.

L’histoire des percussions remonte à l’apparition de l’Homme lui-même. l’anthropologie considère que les premières pratiques musicales de l’Homme étaient vraisemblablement rythmiques.

Confectionnés à l’aide d’objets communs (bout de bois, pierres) ou d’os et de peaux d’animaux travaillés, ces instruments primitifs étaient souvent liés aux cérémonies cultuelles. Bien que dans les sociétés « primitives » et extra-européennes ces instruments occupent toujours une place importante, ils ont été longtemps délaissés dans la musique occidentale. Ce désintérêt s’explique par presque mille an de musique vocale au service de la liturgie, favorisant la mélodie et ses superpositions polyphoniques annonçant le concept harmonique qui sera le socle de la musique européenne à partir du 17ème siècle.

Quand la musique instrumentale se développe à la Renaissance, dès la fin du 15ème siècle, les percussions ne répondent pas aux attentes des compositeurs qui privilégient les instruments à hauteurs définies par mimétisme avec le chant.

Seules quelques percussions, émettant des sons fixes et identifiables sont employées, ponctuellement, comme les premières timbales et uniquement dans des ensembles de grande taille.

On pourrait schématiser l’évolution de l’orchestre chronologiquement par l’enrichissement successif des ensembles instrumentaux standards.

Ainsi, les premier ensemble se fixe autour du pupitre des cordes frottées qui obtiennent leurs formes définitives dans la première moitié du 18ème siècle.

Héritières des violes de gambe, elles forment le premier noyau de l’orchestre constitué des violons, violons altos, violoncelles et contrebasses souvent agrémentés d’un clavecin (instrument à cordes pincées) pour soutenir l’harmonie.

Il faut attendre le début du 19ème siècle pour connaître l’âge d’or des bois. Ces instruments intègrent durablement l’orchestre grâce à des améliorations mécaniques qui leur permettent de rivaliser en virtuosité avec les cordes.

Les cuivres, qui bénéficient également d’améliorations techniques à la même époque, gagnent véritablement leur place dans l’orchestre dans la deuxième partie du 19ème siècle. La dernière évolution de l’orchestre se fait par l’explosion du pupitre des percussions, au début du 20ème siècle.

Si les autres pupitres de l’orchestre sont assez standardisés, celui des percussions fait office parfois de magasin d’outillage. Les instruments du pupitre des percussions sont généralement classés en deux groupes (indépendamment de leur type : membranophone, idiophone, etc.) selon qu’ils émettent des sons à hauteurs définies ou non.

Les instruments à hauteurs définies sont utilisés de la même façon que tous les autres instruments de l’orchestre, mélodique, harmonique et rythmique, et seul leur timbre prévaut dans leur emploi.

On y retrouve les classiques comme le jeu de timbales ou les plus modernes comme les claviers (xylophone, vibraphone, cloches, etc.) qui peuvent jouer des notes identifiables.

Le second groupe réuni les percussions qui ne peuvent pas émettre de note précise et se rapporte plus à du bruitage. Ils ne peuvent pas à proprement parler assurer des fonctions mélodiques et harmoniques. Ce sont par exemple les cymbales, triangles, caisses et autres accessoires (castagnettes, tambourin, etc.). Parfois, les percussionnistes doivent manipuler des objets inattendus comme des jouets (flûte à coulisse, crécelle…), des outils industriels(enclume, burin…), des objets du quotidien (machine à écrire, chaînes…) et plus exceptionnellement des sirènes, des tôles, etc…

Il arrive même qu’on demande au percussionniste de plonger un instrument dans un récipient d’eau pour obtenir un extinction originale de la résonance.

Le pupitre de percussions demande à l’interprète une grande polyvalence et parfois un véritable talent de bricoleur sollicitant toute son ingéniosité pour retranscrire « avec les moyens du bord » les sons voulus par le compositeur et qui ne font pas appel à des instruments conventionnels ou empruntés à d’autres cultures.

La richesse des sonorités et des possibilités de ce pupitre a occupé une grande place dans la création musicale du 20ème siècle.

Certains compositeurs les mettent à l’honneur comme Béla Bartók (1881-1945) dans sa Musique pour cordes, percussion et célesta(1936).

D’autres ne font appel qu’à ce pupitre comme Edgard Varèse (1883-1965) dans son œuvre phare Ionisation(1931).

Il arrive également que le pupitre de percussion soit mis au rang de soliste dans des œuvres concertantes comme Black Rainbow (2013) de Nathan Daughtrey (1975-) pour 6 percussionnistes solistes et orchestre d’harmonie. L’œuvre explore d’un tenant les couleurs insaisissables d’un arc-en-ciel lunaire – c’est à dire produit par la lumière réfléchie de la Lune à la place du Soleil – du rouge au violet dans une approche mystique et symbolique :

– Rouge : activité, énergie, passion

– Orange : créativité, espièglerie, équilibre

– Jaune : sagesse, clarté de la pensée, ordre

– Vert : harmonie, sympathie, croissance, expansion

– Bleu : paix et compréhension, calme, détente

– Indigo : l’infini, pont entre le fini et l’infini

– Violet : combinaison d’énergies rouges et bleues : considéré à la fois comme une fin et un début